16 févr. 2012

Dans la rue... Esplanade, Montréal

29 mai 2011





Elle sait bien qu’au moment exact où Alberto passera définitivement la porte pour ne plus revenir, tous ses désirs extraconjugaux, et la frustration de laisser toujours à l'état de fantasme les prémices de rencontres amorcées d'un regard, les envies - inattendues, mais violentes - de baises, sauvages avec un inconnu, tendres avec un ami, se désintègreront. Qu'ils ne seront plus « sa liberté ».

Pourquoi? Il lui faudra coucher sur le papier cette grande réflexion partant de Sartre, et menant de la responsabilité au désir. Mais là, ce qui l’habite à cet instant précis, c’est le fait que, tout comme on ne désire que ce qui nous manque, on éprouve le besoin d’être libre parce qu’on ne l’est pas. La liberté ne serait alors qu’un désir, non une valeur, et la démocratie, en nous libérant du désir de liberté, laisserait plus de place à d'autres désirs, l’amour, le bonheur, la maison, la voiture, la seconde voiture, la machine à expresso, la veste griffée, la chaleur de la Floride, le bonheur, l’amour, le bonheur, le bonheur, le bonheur.

Elle se demande si elle ne pourrait pas dire qu’elle désire la liberté au même titre qu’elle a ardemment désiré qu’il se passe quelque chose avec ce Jérome dans le métro, ardemment désiré que ce regard qui la perçait se rapproche du sien jusqu’à ce que leurs lèvres se collent. Ardemment désiré tout en tremblant à l’idée que cela arrive et que le désir, du même coup, soit chassé, laissant la place à d’autres sentiments bien plus rugueux comme le remord. Ou la déception. 

N’est-elle pas finalement heureuse dans cette cage? Car, enfin, elle le sait, la cage est ouverte.
Mais lui. Le sait-il?


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