7 juil. 2015

Dans... une ruelle du Mile-End, Montréal

22 novembre 2014

Il trouve son équilibre dans les gestes répétitifs. Le téléphone que l'on pose le soir sur sa table de nuit après avoir vérifié que le réveil était enclenché à la bonne heure. Les bouchons qu'on s'enfonce dans les oreilles juste avant d'éteindre la lumière. L'alarme qui sonne et qu'on éteint vite pour ne pas réveiller l'autre. Le café bu lentement, seul moment lent de la journée, il s'assoit, il ralentit le mouvement de son bras qui mène la tasse de la table à sa bouche, et vice versa, jusqu'au point où il n'est plus possible à l'oeil nu de percevoir le moindre mouvement. Un peu comme ces horloges dont les aiguilles ne sautent pas brutalement d'une minute à une autre, mais glissent sur le cadran de manière monotone et imperceptible, si bien qu'à la fin d'une soirée avec elle on se demande comment  on a pu s'épuiser sans qu'on ne s'aperçoive de rien. Elle lui a dit : il y a des gestes qu'on connaît tellement qu'il faut les désapprendre. Sortir une poêle, battre des oeufs, découper des légumes, servir quelqu'un n'a plus rien d'autre à nous dire que merci, l'embrasser avant de s'endormir. Ce sont des gestes qu'on enfile comme de vieux vêtements. Et alors on est pris dans les gestes des autres, des gestes qui appartiennent à des ancêtres, à une culture, un genre, un milieu social, à une profession, un statut. Et que le seul moyen d'y échapper, c'est de quitter cette pièce, laisser-là ce qu'on y faisait, enfiler son manteau, ses chaussures, revenir sur ses pas, mettre de la musique dans le salon, puis passer la porte et ne plus s'arrêter. Il lui dit :   ne t'inquiète pas, tout va bien.

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